Voici les 3 mots de septembre 2018 : cinémathèque, désert, apprécier
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Voici les textes que nous avons reçus :
L’Imprévu (Martine)
Fred sort du métro puis s’engage dans la rue de Bercy. A quelques mètres de la cinémathèque française qu’elle n’est pas sa stupeur ! Le parvis est désert. Étonnant à onze heures ! Aucune file d’attente devant le bâtiment ! Seuls quatre vigiles, cachés derrière leurs larges lunettes de soleil, scrutent attentivement les alentours.
– Ma visite semble fichue, songe Fred. Que se passe-t-il ?
Au même instant, Nadège sort de la cinémathèque par une petite porte dérobée. Fred la voit et rapidement va à sa rencontre. A coup sûr son amie va pouvoir le renseigner puisqu’elle travaille ici.
– Hello Nadège!
– Bonjour Fred, comment vas-tu ?
– Je vais bien. Sais-tu pourquoi la cinémathèque est fermée ce matin ?
– Les lieux ont été réservés par un couple V.I.P. pour une visite privée toute la matinée. Les visiteurs en possession de billets électroniques ont été prévenus mais évidemment pas ceux, comme toi, qui ont décidé de venir sans réservation. Il ne te reste plus qu’à revenir cet après-midi.
– C’est ennuyeux. Cet après-midi j’ai autre chose de prévu.
Nadège sourit. Elle reconnaît bien là son ami. Avec lui, pas de place à l’imprévu, tout est programmé. Malicieusement, elle suggère :
– On pourrait peut-être allez prendre un pot ? Enfin, je te dis ça… mais je te laisse apprécier ma proposition.
Fred rougit. Si elle savait combien elle ne le laisse pas indifférent ! Mais sa timidité le freine à exprimer ses sentiments. Pourtant, ce matin, le destin semble lui tendre une « perche ». L’occasion est trop belle pour la laisser passer…
– Avec plaisir, répond-il. Nous pourrions même déjeuner ensemble si tu es d’accord. Tu pourrais aussi m’accompagner à l’Institut du Monde Arabe ensuite si tu n’es pas pressée ?
– Allons-y ! répond-elle dans un éclat de rire.
Spontanément, elle glisse son bras sous celui de Fred et tous deux s’éloignent gaiement alors que le couple de V.I.P. apparait sur le seuil de la cinémathèque pour s’envoler vers une autre destination.
Paris (Caroline)
PARIS est un désert au mois d’août, tout le monde sait cela !
D’habitude j’apprécie le plaisir de déambuler tôt le matin avant que les avenues et mêmes les petites rues ne soient envahies de touristes, dont certains se satisferont de poser au côté d’une statue ou d’un monument historique !
J’en ai vu lors d’une visite à l’opéra Garnier, se prendre en » selfie » avec le plafond de la rotonde !
Heureusement la Joconde au musée est protégée … Je me promène dans la chaleur installée sur la ville.
J’ai dû rester à Paris afin de régler un léger problème, mari, enfants et amis sont dispersés aux quatre coins des vacances, de plus, avec regret, j’ai tourné la dernière page d’un « chouette » bouquin.
C’est toujours un moment difficile, aurais-je le même plaisir avec le prochain livre ?
J’apprécie d’être seule, souvent, mais pas aujourd’hui, que faire ?
Tiens … si j’allais voir un vieux « chef d’œuvre » à la cinémathèque ! Il doit y faire frais …
Je suis installée dans le noir … sur l’écran le film est en noir et blanc… peu de mouvement … peu de paroles… peu d’intérêt… Je suis hermétique au sujet, je m’ennuie !!
Allez ouste !… Je sors de la salle pour me mêler aux touristes et je les regarde avec amusement faire leurs selfies…
Le film (Colette Kirk)
– Mais mamy ! Pourquoi veux-tu que je t’accompagne à la cinémathèque ?
– Parce que je voudrais y effectuer des recherches.
– t quelles recherches ?
– Oh ! Tu sais c’est une lointain souvenir mais que je voudrais, avant de disparaître, le revivre.
– Tu peux préciser et me raconter ?
– J’étais une toute jeune fille et je m’étais mise en tête de devenir, aux grands désespoirs de mes parents, comédienne. Mon père m’ayant menacé de me couper les vivres si je ne continuais pas mes études, je fini par faire ma valise et quitter le toit familial. Les débuts dans le métier furent difficiles. Pour pouvoir me payer les cours d’arts dramatiques, je faisais de la figuration dans certains films. C’est précisément sur l’un d’eux que j’ai besoin de faire une recherche. Le scénario de ce dernier était plutôt banal. C’était une aventure entre un prince arabe et une danseuse de cabaret. Pour je ne sais quel conflit, il y avait également affrontement entre les arabes et la Légion étrangère. La bataille avait lieu en plein désert. Apparemment le budget du film ne permettait pas de se rendre au Sahara en Algérie, alors ce dernier a été tourné à Ermenonville à « La Mer de Sable ». Pour le décor, quelques rochers de papier mâché, trois ou quatre faux palmiers, des tentes et une petite caravane de vrais dromadaires. Depuis, 1963, je crois maintenant que c’est un parc d’attractions apprécié par de nombreux visiteurs. Donc pour en revenir à mon film où j’avais un tout petit rôle. Dans ce dernier, habillée en bédouine, je portais secours à un légionnaire gravement blessé qui réclamait à boire, mais le malheureux mourait dans mes bras. Cette scène ne durait que deux ou trois minutes mais a permis à la caméra de fixer pour la postérité mon image que je pensais utile pour ma future carrière de star. Le problème, vois-tu c’est que j’ai oublié le titre de ce film. Le légionnaire était également un figurant, pourtant je me souviens de lui comme dans la chanson : il était mince, il était beau, il sentait bon le sable chaud, mon légionnaire. Y’avait du soleil sur son front qui mettait dans ses cheveux blonds de la lumière. Je ne l’ai jamais revu sur le plateau d’un autre tournage. Aussi je suppose que mon bel inconnu a depuis pris du ventre, des cheveux blancs et marche avec une canne. Et lui se souvient-il de moi ? Quant à moi, j’ai rencontré un grand brun, costaud qui m’a donné le plus beau rôle de la vie : être sa femme et la mère de ses enfants.
Retour à la campagne (Susan)
Aujourd’hui Marie a la nostalgie du pays de son enfance. Ce manteau ouaté de neige poudreuse étalée sous la canopée de la forêt hivernale qui emmitoufle et câline, ce bercement de clapotis au bord du lac où se reflète le ciel étoilé d’été, l’odeur capiteuse des vastes prairies désertes parsemées de genêts jaune vif au printemps… toutes ces choses qui à l’époque lui semblaient mortellement ennuyeuses, maussades et monotones lui paraissent merveilleuses avec le recul. Les longues journées où elle se morfondait, cloîtrée dans sa chambre à observer la pluie incessante d’automne, se sont transformées dans son esprit en moments de paix et de bien-être.
Elle a eu hâte de quitter cet endroit qu’elle n’appréciait guère. Elle rêvait de jolies boutiques aux vitrines captivantes où s’étalaient des robes chamarrées et chatoyantes, de restaurants aux lumières scintillantes, de bals où l’on danse frénétiquement jusqu’à l’aube, de cinémathèques et de concerts techno, de foules animées respirant la vitalité.
Aujourd’hui grisonnante, elle réside dans une banlieue morne et déprimante où des gens cohabitent avec autant d’élégance que des carpes affamées dans un bassin étriqué. Ses oreilles sont assaillies par le fracassement des voitures qui passent et repassent sous sa fenêtre. Son cœur bat au rythme des autobus bondés qu’elle attend et qui tardent à arriver. Son corps est imprégné de l’odeur de sauvagine du métro qu’il faut emprunter pour aller au travail. Elle n’est jamais seule mais sa solitude est totale.
Elle attend. Dans trois ans elle prendra sa retraite et elle retournera chez elle à la campagne.
Nous remercions les auteurs et rappelons que les textes leur appartiennent. Toute reproduction est interdite.