Allo … le 18

juil 2015 -
Si les mots avaient des ailes

Par M.F.L.

Je suis assise dans l’herbe ; hébétée, je regarde mon bungalow brûler… J’ai autour de moi ce que j’ai pu sauver : sac à main, quelques vêtements, des papiers, le vase offert par ma mère, la télé… J’ai prévenu les pompiers, ils vont arriver… Jamais je n’aurai pensé qu’une maison puisse prendre feu si rapidement !…

Je n’ose pas appeler mon mari, et d’ailleurs, mon portable est-il dans mon sac ? Oui, mais je n’ose pas. Comment pourrais- je lui expliquer ? Il me traite toujours de tête en l’air, d’irresponsable… Pourtant cela faisait plusieurs jours que je lui avais demandé d’exterminer cette sale bête ; il avait répondu en se moquant de moi, disant qu’elle sortirait bien un jour, que mes peurs étaient ridicules ; il aime beaucoup prendre des airs supérieurs. Alors j’ai décidé de me débrouiller toute seule, et voilà le résultat ! J’aurai peut-être pu arrêter le début d’incendie en renversant ses aquariums… Trop tard ! Je n’y pense que maintenant, et puis il m’en aurait tellement voulu ; il n’y a rien à faire à présent !

Non, mais quelle sale bête ! Sauvage, elle était, ou plutôt elle est, car je suis certaine qu’elle s’est échappée à temps ; elle était si vive, si rapide… Elle me narguait, m’observait, et, quand elle sentait le danger, pfft, elle filait dans un recoin… Quand j’ai commencé la chasse, je me suis armée d’une chaussure à semelle ferme et raide, car je ne voulais surtout pas avoir à la toucher, cela me révulsait ! Je suis montée sur une chaise, sur l’évier, sur la table, sur une commode, et toujours elle s’enfuyait ; le temps que je descende de ma chaise, que je la replace, que je regrimpe, elle s’éloignait à nouveau… C’était comme si je l’entendais rire, oui, elle ricanait, et cela, je ne l’ai pas supporté ! Mais à qui pourrai-je dire cela ?

J’entends les sirènes… Il y a du monde autour de moi ; ils essaient de me consoler, car je sanglote ; je dois m’écarter pour laisser les pompiers travailler… Quelqu’un m’apporte du café, me demande si je ne suis pas blessée, s’il n’y a plus personne dans la maison… Si, j’ai dit, cette sale bête ! Un chien, un chat ? Non, non, je me suis reprise, il n’y a personne… Le pompier qui m’interroge hoche la tête et me dit : « vous êtes en état de choc, détendez-vous… »

En état de choc, j’y étais tout à l’heure, quand j’ai enflammé des boules de papier journal, que je les ai jeté sur cette effroyable araignée réfugiée dans le rideau, puis dans le calendrier des Postes, et puis… puis… je ne sais plus… tout a flambé !…

Mais ce n’est pas possible !… Quelle horreur !… Là, sur ma chaussure, elle est là… Elle me regarde, elle me guette…

M.F.L.

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